31 octobre 2007 15:58 • Plaine des Berges

L’épreuve, par l’image

Fragment 5,
de sujet principal

13 mars 2012

Fragment 5,
de sujet principal

13 mars 2012

Ce blog est. C’est ce qu’il me semble. Mais paradoxalement, je sais surtout ce qu’il ne sera pas.
Ce ne sera déjà pas un blog de photographe.
Un photographe exerce son métier, son œil, dans le libre choix de ces propres thématiques : passionnelle, auto-expressive, artistique, documentaire, fonctionnelle, alimentaire…
Je n’ai pas eu ce choix ; les prises de vues qui ont rythmé nos balades depuis quinze ans relèvent d’un sujet imposé, d’une monothématique obsessionnelle ; lui, moi, nous, au-dessus de notre horizon, dans le périmètre de chacun de nos pas et tout ce qui se trouve entre ces deux infinis ; par tous les temps, par petites touches, répétitives, anecdotiques. L’impulsion de départ était née d’un constat presque inconscient : le temps à consacrer aux loisirs s’enfuit, il s’agit d’optimiser toute minute qui passe, d’essayer. Et sur le terrain, c’est devenu l’exutoire nécessaire, une fuite, puis un jeu avec Émilien et un prolongement affectif. Presque thérapeutique. Émilien est sensible à l’image. À nos images, aussi. Émilien aime les voir, les revoir, se voir.

[… Il est stabilisé. Plus de cris. En quelques centaines choisies, les images défilent sur l’écran plat, sur fond de musique qu’il aime : des standards du rock, des morceaux de musique africaine, diverses guitares, du classique parfois et du rap aussi. Lui est scotché, peut-être serein ; nous, on ne bouge plus, on ne moufte plus ; tout juste lui prendre la main, question de sensation pour fixer ces moments rares…]

J’ai mis plusieurs années à comprendre que toutes ces images ne prennent un sens que dans leur globalité, maelström de notre désarroi étouffé.
Et même là, si je peux y concevoir une dimension documentaire et passionnelle, forcément, cela ne fait pas de moi un photographe.
Un des premiers commentaires a été posté par un ami, éloigné par la (notre) vie (1)
. Je ne sais comment il a pu « tomber » si vite sur ce blog ; je suppose que c’est lié à son travail. Car lui, est un photographe de métier, exigeant, créatif, teigneux, absolu et qui travaille en partie pour ce support même qui m’héberge aujourd’hui.
C’est lui qui m’a fait découvrir — en argentique encore à l’époque, — ce moment chamanique où l’image qui se révèle fixe pour longtemps un instant qui n’existe plus et qui vous appartient à jamais, parce que vous l’avez capturé, là devant vous, fier, propriétaire ; et comprendre toute la portée et tout le respect à apporter à cet acte créatif…

J’ai vu depuis monter et proliférer des technologies dont les promoteurs suggèrent que l’art se calcule en méga-octets et qu’une bonne photo est une photo nette. Bien sûr que résolution et qualité sont nécessaires, mais c’est l’évocation qui compte.
Quand un photoreporter meurt de sa profession, c’est toujours par l’impact de cette évocation, cette puissance dérangeante qui les transforme en cible dans des pays en guerre (2). Ceci sera évident pour beaucoup, mais ce qui est évident n’est pas toujours perçu : je vois aussi au jour le jour leur profession galvaudée, vulgarisée, phagocytée, dans les secteurs d’activité qui utilisent l’image comme vecteur d’émotion. Submergé par un message visuel omniprésent, le public s’habitue à accepter des images mortes, molles, moyennes, sans âme et sans portée.
Peut-être que dans cette surconsommation, l’image jetable devient plus digeste.

Digressions et vagabondages

C’était une digression, le sujet mériterait mieux.
Ici, ce n’est que le luxe d’un petit hommage envers l’image, celle par qui le texte se transcende et envers ceux qui la font avec honnêteté et passion.
Et aussi, je m’en aperçois, un moyen de me défausser, d’excuser ce culot qui me fait ici exposer, m’exposer ; matériau visuel pas toujours bien modelé, mais sincère et indissociable de la charge affective et de la trame narrative de ce blog.

[Sur une image de lui en forêt, je tente : « Titi, tu es le plus grand des marcheurs… » Il rit, fort, me tire par le bras et s’applaudit en déclamant son cri de combat :  «Ha co co ya tché » ; puis reporte son attention sur la prochaine vue : un gros nuage d’orage avec Zombie (3) en fond.
Dolores O’Riordan ne pourrait [n’aurait pu] imaginer l’impact de cette chanson… Le diaporama ne va pas tarder à reboucler.]

Je ressens aussi nos vagabondages, ces mises hors sujet champêtres, comme des digressions où Émilien semble en suspension ; quittant sa ligne comportementale du moment pour la reprendre aussitôt après, contre toute espérance. Mais chaque heure passée à marcher éclaire quand même le sujet principal, l’épreuve ; comme des lumières, en hors-champ, signifiantes si l’on s’y attarde, et riches d’espoir, au final. Et de concevoir la vie elle-même avec lui comme une digression, qui s’éterniserait. Développement s’étant écarté du sujet principal, développement troublé et submergé. Ça amènerait une autre interrogation, poignante pour nous : mais quel est-il, ce sujet principal ?

[Le diaporama a rebouclé. La musique aussi ; depuis un moment. Il n’est plus là. Il est plus loin, avec sa mère, qui a pris le relais sur une autre digression.
J’ai dû m’assoupir.]

Armand T.

16 août 2007
11:27
Le Pain de Munition
16 août 2007 11:27 • Le Pain de Munition

Sauf indications contraires, textes, dessins et photographies sous © Didier-Trébosc

autisme-hieroglyphe

Éric Franceschi

“De son vrai nom Ursule Peretti est un French Professionnal Photographer passé de l’actu quotidienne à la nature morte qu’il tue des fois lui même.”

Tout est dit ainsi, là, en exergue de son compte Instagram, tout le reste n’est qu’images…

Rémi Ochlik

Photographe de guerre français, Rémi Ochlik est mort à 29 ans suite d’un bombardement du régime syrien sur le centre de presse où il se trouvait, le 22 février 2012 à Homs, bombardement qui a également tué la journaliste Marie Colvin…

«Quand on déploie ce type de moyens logistiques et militaires, ce n’est absolument pas le fruit du hasard. Le régime [de Bachar al-Assad] a délibérément voulu atteindre ces journalistes»

2018, malgré un dossier accablant ::·

Zombie…

The Cranberries – No Need to Argue 1994. Un engagement, Dolorès O’Riordan a 22 ans, elle rend hommage à 2 enfants tués à Warrington en Angleterre par une bombe de l’IRA provisoire. Les parents d’un des garçons militeront ensuite pour la paix en Irlande du Nord.

Un succès, international, Zombie dépassera en avril 2020 le milliard de vue sur YouTube…

Mais tout cela, Émilien ne le sait pas, il ne saura jamais, sans doute, que la puissance évocatrice du morceau.

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